Spin des électrons
Les applications utilisant le spin des électrons sont regroupées en pratique sous le vocable de spintronique, l'électronique des courants de spin.
Générer des courants de spin
Pour pouvoir faire de la spintronique, il faut d'abord être capable de générer des courants de spin, comme en électronique il faut pouvoir générer des courants de charge. Sauf que nous n'avons pas encore découvert une "batterie de spin". Pour le moment, on l'a vu précédemment, on sait à peu près générer un courant de spin à partir d'un courant de charge, souvent avec des ferromagnétiques, mais aussi à partir du couplage spin-orbite (genre effet Hall de spin dans les métaux lourds), ce n'est pas si mal.
Détecter des courants de spin
Il faut aussi pouvoir détecter et mesurer ces courants de spin. L'effet Hall de spin inverse est là pour nous aider, mais les recherches sur les matériaux bidimensionnels et les isolants topologiques (qui sont isolants dans la masse et conducteurs en surface) vont bon train.
Manipuler les courants de spin
Modifier, amplifier, diriger... autrement dit faire les opérations habituelles en électronique de charge sont encore à leurs balbutiements, mais on a déjà découvert un certain nombre de dispositifs, parfois très utiles comme la GMR. Voici quelques exemples d'applications possibles, certaines sont développées plus loin :
- Mémoire magnétique (MRAM)
- mémoire électronique circulaire (spin drive)
- oscillateur électronique de fréquence contrôlable par un courant continu (modulation de fréquence)
- détecteur de champs magnétiques ultra-faibles (et/ou éloignés)
- détections de micro-ondes
- faire des calculs avec une très faible consommation électrique
- spintronic thermoelectric power generators
- ...
GMR et tête de disque dur
La magnétorésistance géante GMR a permis un énorme pas dans le domaine des disques durs à la fin du siècle dernier, puisque la résistance électrique varie dans des proportions considérables suivant l'orientation du champ magnétique :
On a donc réalisé des têtes de lecture de disques durs avec la GMR, en conservant la tête inductive pour l'écriture :
Il y a évidemment intérêt à ce que ça ne vole pas haut comme mes pages web. La distance entre la tête et le disque doit être aussi faible que possible, mais il ne faut pas qu'elle atterrisse (les disques durs n'aiment pas les chocs), et que ça aille aussi vite que l'on peut sinon la vitesse de lecture sera lente et le disque dur se traînera...
Vous y verrez d'autres applications, genre position d'une valve ou piston de moteur.
Les dernières avancées technologiques en matière de tête de disques durs se situent surtout dans l'écriture des données, par exemple en assistant l'écriture avec de la chaleur.
Mémoires magnétiques MRAM
Une RAM (random access memory) magnétique est un point mémoire où l'information est stockée sous forme magnétique. Un avantage par rapport aux RAM habituelles est qu'elles sont non-volatiles, elles ne perdent pas la mémoire quand le courant est coupé.
L'empilement est celui de la GMR, version tunnel : une couche de ferromagnétique "de référence" dont l'orientation ne changera jamais, une couche "tunnel", et une couche de ferromagnétique qui contient un bit d'information sous la forme de la direction de l'aimantation.
La lecture se fait en appliquant un courant, qui sera plus ou moins important suivant la résistance qui dépend de l'orientation relative des deux couches aimantées :
Suivant l'orientation relative des aimantations, le courant est fort ou faible.
Un transistor permet de sélectionner ce point-mémoire.
La lecture du point-mémoire est donc très simple, et requiert très peu d'énergie grâce à l'énorme différence de résistivité entre les deux cas. Mais il faut pouvoir écrire l'information, c'est-à-dire retourner l'aimantation.
L'ancienne méthode consistait à appliquer un champ magnétique suffisamment puissant pour retourner l'aimantation. On le faisait en faisant passer un fort courant dans un fil à proximité du point mémoire : un champ magnétique se forme circulairement autour du fil. Mais cela n'était pas très efficace énergétiquement parlant, et il faut une garde suffisante avec les points-mémoire voisins, ce qui n'est pas favorable pour la densité de la mémoire.
Nous avons vu que deux mécanismes permettent de modifier la direction d'aimantation d'un ferromagnétique en utilisant le spin des électrons :
Les deux sont utilisables pour écrire des points-mémoire magnétiques.
La version STT est certainement la plus simple car le chemin du courant pour écrire est le même que pour la lecture, mais il faut prévoir de pouvoir retourner le courant pour inverser l'aimantation dans les deux sens.
Il faut un courant assez important pour provoquer le retournement.
Mais il faut prévoir de retourner le courant.
L'usage du SOT Spin Orbit Torque offre un avantage de consommation, mais requiert une connexion supplémentaire pour arriver "sur le côté".
Les chercheurs et constructeurs travaillent sur l'optimisation des couches afin de réduire les consommations électriques en augmentant les effets, l'organisation des points-mémoire, mais également aussi sur des ajouts pour renforcer les effets, par exemple en assistant thermiquement l'écriture.
Il existe également une version où il s'agit de déplacement de murs d'aimantation entre deux domaines.
L'utilité principale est de mettre ces mémoires non-volatiles directement au-dessus des processeurs pour remplacer les SRAM (static RAM) et avoir la mémoire aussi près que possible de la zone de calcul, et augmenter la vitesse d'exécution des programmes.
Voilà pour les deux principales applications utilisant le spin des électrons. Je vous laisse fouiller Internet pour les autres, plus confidentielles et/ou en pleines recherches.