Intro à la mécanique quantique
Par où passent les photons ?
On vient de voir qu'un photon est une onde en essayant avec un pointeur laser et deux fentes.
Mais on arrive aussi à compter les photons un par un. On sait, avec l'expérience de l'effet photoélectrique, qu'un photon contient un quantum d'énergie, laquelle valeur est reliée à sa fréquence, sa couleur si vous voulez.
On a donc voulu voir par quelle fente passe le photon.
On sait détecter un photon
De nos jours, on détecte et on compte les photons avec une diode à avalanche [SPAD]. Lorsqu'un photon arrive sur une diode de ce genre, un électron est "délogé", = reçoit un surplus d'énergie, lequel électron va en déranger quelques autres, et un phénomène d'avalanche se produit : on voit un signal sur la sortie de la diode, une espèce de pulse de tension, bien visible à la sortie.
Je ne vous parle pas des problèmes secondaires liés à cela, du genre "temps d'attente avant de pouvoir en détecter un nouveau photon", ou "comment distinguer si on a eu un seul photon et pas plusieurs", et autres problèmes de mise en œuvre, mais bon, on sait voir un photon arriver.
De plus, on va utiliser un chronomètre ça on sait bien faire et "détecter des coïncidences" : on utilise deux diodes à avalanche, et on regarde si on détecte deux photons exactement en même temps. Le chronomètre est surtout utile quand on allonge les chemins optiques, car on sait aussi que le photon va à la vitesse de la lumière sans blague ! et donc il met un certain temps à parcourir le chemin, et si on a plusieurs chemins de longueur différente, alors il faut tenir compte du décalage temporel.
On sait même noter l'heure de départ du photon en pilotant correctement la source. Une source de photon unique n'est pas facile à faire, mais bon, on sait raisonnablement comment marchent nos sources.
L'idée est de refaire l'expérience des fentes d'Young, où on a vu que notre photon était une onde. Mais cette fois, on va les envoyer un par un : évidemment, l'objectif est de l'enquiquiner, ce fichu photon, parce qu'un par un, on ne voit pas trop comment il pourrait être aussi une onde, non ?
Premier test naïf
Un peu évident :

Oui, le résultat est comme on l'attend: le photon passe d'un côté ou de l'autre, mais pas les deux à la fois. C'est donc une particule, non ?
Ceci dit, difficile d'être absolument certain : peut-être que notre source de lumière ne produit pas vraiment un seul photon à la fois ? Cela a été longtemps un problème.
Aucune interférence visible avec un tel montage, on sent qu'il va falloir être plus malin.
Avec un aiguillage
On va utiliser une lame semi-réfléchissante qui permet de passer la moitié de la lumière en réflexion et l’autre moitié transmission. Un truc bien connu en usage « normal »: on mesure l’intensité lumineuse de chaque côté, et on retrouve 50% de chaque côté.
On va utiliser notre détecteur de coïncidences, et il faudra beaucoup limiter l’intensité lumineuse -on aimerait bien avoir un seul photon à la fois. Si ça se trouve, ces filous marchent toujours par paire !

Cette fois, on peut calculer une valeur dépendant de nos résultats de mesure, qui servira de critère. Si nos photons marchent bien un par un, on observe plutôt une "probabilité de détection" = le nombre de détections pendant une période fixe.
La probabilité de détection est proportionnelle à la valeur moyenne de l’intensité de l’onde I :
- Probabilité de détection en D1 : P1 ∝ I
- Probabilité de détection en D2 : P2 ∝ I
- Probabilité de détection en coïncidence : Pc ∝ I2 (c'est le carré)
On peut donc définir un critère Pc / P1P2 = 1. Autrement dit, on aura une onde si le rapport de probabilité vaut 1 ou plus. Si c’est (franchement) moins de 1, ça veut dire qu’il n’y a eu aucune coïncidence, et on a une particule.
Avec de la lumière atténuée
On essaye avec de la lumière atténuée (donc pas forcément des photons un par un, on n'est pas sûr). On va commencer avec ça pour prendre conscience que ça ne va pas être simple, malgré la simplicité apparente de ce test.
Les sources de lumière classique, à incandescence, fluorescentes et même laser, utilisent beaucoup d’atomes qui sont simultanément excités, avec une distribution de Poisson.
On sait que l'on envoie les photons par "paquet", avec une certaine probabilité concernant leur nombre : aucun photon, 1 photon, 2 photons, 3 photons...
"0.01 photon en moyenne" : ce n'est vraiment pas beaucoup. Très souvent, il n'y a rien ! C'est vraiment très atténué. Voilà le résultat :

En coïncidence, tiens-donc. Les deux côtés à la fois ? Ah bon, c'est une onde alors ?
On a dû rater un truc quelque part, il faut douter de ce qu'on interprète. La lumière «beaucoup atténuée» n’est peut-être pas constituée de photons uniques ?
Avec un seul photon à la fois
Donc les chercheurs ont travaillé sur des sources de photon a priori vraiment unique, dans l’espace et dans le temps ─ce qui n'est pas simple à faire et prouver. Le résultat avec de telles sources est :

À se tirer des balles.

Cette fois, ces sources se comportent bien comme des photons uniques, le photon est transmis ou réfléchi, mais pas les deux. Donc c’est bien vrai, les photons sont des particules.
Aussi. En même temps seraient-ils macronistes ?
Va falloir être encore plus malin. Mais on a des idées pour faire suer le photon !